Comment choisir son pain ? Gare au blé moderne !

Ancien journaliste, Adriano Farano est devenu expert en pain après trois ans de recherches et un livre publié aux éditions du Rouergue. Ici, il explique comment choisir son pain en commençant par connaître la variété de blé utilisée.

Quand on visite une boulangerie, choisir son pain n’est pas une mince affaire. En effet, plusieurs pains nous sont proposés : baguette courante ou baguette tradition, pain au levain, pain bio… En tant que consommateur ou consommatrice, on est vite perdus ! Du coup, on a tendance à se réfugier dans des habitudes alimentaires sans forcément comprendre les critères scientifiques à même de pouvoir guider notre choix. 

"Je ne mangerai pas de ce pain-là" d'Adriano Farano from Éditions du Rouergue on Vimeo.

Je suis ancien journaliste primé par l’Université de Stanford en Californie, j’ai passé ma vie à enquêter pour, entre autres, Le Figaro, Radio France et Café Babel pour trouver des réponses à des questions complexes. 

Après plus de trois ans d’études, j’ai développé une expertise sur le sujet du pain et comment bien le choisir. J’ai donc publié un livre sur le pain aux éditions du Rouergue : “Je ne mangerai pas de ce pain-là”. 

Choisir son pain n'est pas une mince affaire

Aujourd’hui, je veux partager avec vous le résultat de mes recherches sur le sujet du pain. Comment choisir son pain ? Comment se repérer en boulangerie pour que ce pain corresponde au mieux à nos attentes ? 

Lorsqu’on veut choisir son pain, il faut réfléchir à trois éléments : 

  1. Le blé : est-il de variété moderne ou de variété ancienne ?
  2. La farine : est-elle moulue aux cylindres métalliques ou à la meule de pierre ?
  3. La fermentation : s’opère-t-elle à base de levure ou de levain ?

Dans cet article, nous aborderons le premier point : le blé en s’intéressant tout particulièrement au blé moderne qui sert de base à la fabrication du pain conventionnel.

Pourquoi commencer avec le blé ? Car le pain, c’est d’abord un produit agricole. C’est avec la terre, c’est dans les champs, que commence l’histoire incroyable du pain. 

Quand on veut choisir son pain en revenant à son origine, c’est alors au blé qu’il faut d’abord s’intéresser.

Mais tous les blés ne sont pas pareils !

Photo de Polina Rytova

Pour simplifier, il existe deux grandes familles : les blés modernes et les blés anciens.

Les blés modernes sont à la base de 99 % du pain consommé de nos jours. Pourquoi ? Car ils sont au moins 5 fois plus productifs que les blés anciens. Vous prenez un hectare cultivé au blé moderne, vous obtiendrez 7,5 tonnes de blé en moyenne en France, selon les informations que j’ai pu récolter auprès d’un grand expert de l’INRA, Pierre Feuillet que j’ai interviewé dans mon livre. 

Comment le blé moderne est-il apparu ? L’histoire du blé moderne démarre en 1913 avec les premiers essais de l’agronome Nazareno Strampelli qui parvient à trouver des variétés de blé nain, originaire du Japon. Un blé “bonsaï” pour ainsi dire. D'ailleurs, le Conservatoire des semences de l'INRAE à Clermond-Ferrand m'a confirmé que les variétés de blé dites moderne sont toutes celles qui portent les gènes du nanisme.

L’avantage du blé moderne ? Celui de ne pas s’affaisser, tomber et pourrir : ce que les agriculteurs appellent le phénomène de la verse. Le blé moderne est donc un blé nain qui résiste à la verse, aux rendements très élevés.

Le blé moderne a tiré parti du développement de la chimie pour améliorer ses performances : 

  • Les désherbants empêchent les mauvaises herbes de lui faire de l’ombre.
  • Les pesticides permettent de le protéger des insectes et des maladies car, originaire du Japon, il ne s’est pas adapté à l’environnement européen.
  • Les engrais azotés, enfin, améliorent sa teneur en protéines. 

Car la vraie bataille est là : pour obtenir des farines à même de supporter le pétrissage intensif nécessaire à produire un pain blanc plébiscité par les consommateurs à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, il faut des protéines à même de créer un réseau de gluten très tenace. Un tel réseau de gluten, seules les variétés modernes peuvent le créer.

Deux problèmes surgissent avec le pain au blé moderne :

  1. Le pain au blé moderne est nocif pour l’environnement car le blé moderne nécessite de 150 à 450 kilos d’engrais azotés par hectare. L’azote se transforme en nitrates qui, eux, vont polluer nos nappes phréatiques. Le blé moderne est donc une céréale hautement polluante. Ce qui veut dire que le pain conventionnel a un impact néfaste sur la planète. Lorsque l'on considère qu'un Français consomme en moyenne 93 grammes de pain par jour, on prend la mesure de la catastrophe environnementale à laquelle on contribue, souvent sans le savoir...
  2. Le pain au blé moderne est responsable de la prolifération des intolérances alimentaires car il est doté d’un profil protéique qui empêche le corps humain de bien assimiler ses protéines. D’après des recherches que j'ai fait réaliser par des laboratoires spécialisés dont j'atteste dans mon livre, entre 5 % et 10 % de ce gluten ne se dégrade pas au bout de la digestion. Le pain à base de blé moderne est donc plus difficile à digérer.  

Or, c’est le blé moderne qu’on transforme en farine pour ensuite créer le pain conventionnel que nous mangeons principalement de nos jours. À quelques rares exceptions près, le blé moderne représente aussi l'immense majorité du pain complet, du pain intégral et du pain bio. 

Comment alors choisir son pain ? Après avoir compris pourquoi il ne faut pas acheter un pain au blé moderne, nous devons désormais nous intéresser à ce que nous devons préférer. Il faut comprendre alors le monde des blés anciens. Ceux-ci fera l'objet d'un prochain article. 

 

Crédits : illustration de couverture par Atelier Zemonsta - Audrey Abbal-Duteille. Photo du champs de blé par Polina Rytova.

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